INTERVIEW - RADOINE MEBARKI, PRÉSIDENT FONDATEUR TOUS TES POSSIBLES : « NOUS EXPÉRIMENTONS DES SOLUTIONS INNOVANTES À DESTINATION SOIT DES CHERCHEURS D'EMPLOI EUX-MÊMES, SOIT DES ENTREPRISES POUR LA MISE À JOUR DE LEURS PRATIQUES RH » (France)
Par l’intermédiaire de son association, Radoine Mebarki propose une véritable alternative aux méthodes de recrutement traditionnelles, en proposant une courte immersion du candidat dans le poste à pourvoir afin qu’il puisse tester sur le terrain son, peut-être, futur emploi
INTERVIEW - RADOINE MEBARKI, PRÉSIDENT FONDATEUR TOUS TES POSSIBLES : « NOUS EXPÉRIMENTONS DES SOLUTIONS INNOVANTES À DESTINATION SOIT DES CHERCHEURS D'EMPLOI EUX-MÊMES, SOIT DES ENTREPRISES POUR LA MISE À JOUR DE LEURS PRATIQUES RH » (France)
Par l’intermédiaire de son association, Radoine Mebarki propose une véritable alternative aux méthodes de recrutement traditionnelles, en proposant une courte immersion du candidat dans le poste à pourvoir afin qu’il puisse tester sur le terrain son, peut-être, futur emploi
Depuis son plus jeune âge, Radoine Mebarki a la fibre associative chevillée au corps. Engagé au profit des jeunes de son quartier dès l’adolescence, il a toujours œuvré au profit de ceux qui, en dépit d’une motivation indéniable, ne parviennent pas à franchir les nombreux obstacles qui jalonnent un parcours.
Devenu adulte, cet entrepreneur n’a pas perdu cette appétence pour venir en aide à ceux qui cherchent, sans y parvenir, à s’insérer professionnellement. En créant l’association Tous Tes possibles, Radoine Mebarki incite les entreprises à se rendre séduisantes auprès des candidats afin de les convaincre à postuler auprès d’elles. Pour cela, rien de tel qu’une immersion en son sein, afin de permettre aux candidats de tester les métiers qui recrutent.
Outre le fait de pouvoir découvrir in situ le poste à pourvoir, ce système permet aux candidats de rencontrer leurs potentiels futurs collègues de travail et de démontrer aux recruteurs l’étendue de leurs talents de façon concrète. Une méthode parfois bien plus convaincante que la lecture de quelques lignes sur un CV ou qu’un entretien d’embauche !
Radoine Mebarki, qui s’est lui-même glissé dans la peau d’un candidat potentiel afin de démontrer le bienfondé de sa réflexion, explique au Journal des Palaces les avantages, tant pour les recruteurs que pour les candidats, de cette forme de recrutement qui bouscule les codes établis.
Journal des Palaces : Quel est votre parcours ? Radoine Mebarki : J’ai ce double ADN entrepreneur et militant associatif de l’emploi dans le sang, depuis mon plus jeune âge. Adolescent, j’ai monté une association qui permettait aux jeunes de mon quartier de partir en vacances contre une forme d’engagement en bénévolat. Depuis, je n’ai jamais cessé d’inventer de nouveaux modes d’emploi à destination de ceux qui sont motivés, mais butent face à un obstacle ou sont freinés dans leur parcours.
Aujourd’hui, je dirige des agences immobilières. Et j’adore ça. Mais j’ai une autre passion, qui est de trouver des solutions pour créer des ponts entre des mondes qui ne se parlent pas, au service du bien commun. J’ai vite compris que le secteur de l’insertion professionnelle faisait partie de ces domaines dans lesquels on trouve de nombreuses personnes et structures pleines de bonne volonté, des solutions géniales sur tous les territoires pour toutes celles et tous ceux, nombreux, qui cherchent du travail, et dans lequel il ne manque bien souvent que des ponts, ou une petite innovation complémentaire, pour faire tourner le monde un peu plus rond.
Comment vous est venu l’idée du concept Tous Tes Possibles ? Avant de s’appeler Tous Tes Possibles, l’association s’appelait Tous Repreneurs, du nom de la première expérimentation que l’on a mise en place. L’idée était simple : de nombreux demandeurs d’emploi veulent travailler, mais ne trouvent pas d’emploi dans le monde du salariat, qui a ses codes, ses contraintes et parfois ses préjugés peu favorables aux parcours accidentés et aux profils aux aspérités palpables.
L’entrepreneuriat pourrait leur tendre les bras, mais ils n’ont pas toujours l’idée géniale ou le projet bien ficelé qui permettent de se lancer avec succès. Et puis, partir d’une feuille blanche, cela ne s’improvise pas, surtout quand le banquier a les mêmes codes dans la tête que le recruteur qui vient de refuser votre candidature. Or, dans le même temps, des milliers de petites entreprises mettent la clef sous la porte, alors que leur modèle économique est parfaitement viable. Le patron est juste trop âgé pour continuer ou doit mettre son activité entre parenthèses pour s’occuper de sa santé, d’un proche, etc. et serait prêt à transmettre sa boîte à quelqu’un qui, bien accompagné, n’aurait qu’à mettre sur la table son envie et les bases incontournables d’un profil d’entrepreneur. Nous parlons ici de petites structures, qui n’ont pas de valeur transactionnelle permettant d’intéresser les acteurs traditionnels de la reprise et qui génèrent juste de quoi être fier de vivre de son activité plutôt que de dépendre des mécanismes de solidarité.
On a donc monté un programme d’accompagnement des chômeurs, pour leur permettre d’identifier le projet fait pour eux et les atouts qu’ils pouvaient mettre à son service. On leur a proposé de “reprendre l’idée d’un autre”. Chemin faisant, nous avons réalisé deux choses.
Lesquelles ? La première, c’est que pour pouvoir aller vers l’entrepreneuriat ou le repreneuriat, les demandeurs d’emploi ont besoin d’un bilan de compétences adapté à leur situation, notamment pour les chômeurs longue durée, qui leur permette à la fois d’identifier leurs talents, les démarches à effectuer pour entreprendre leurs projets, mais aussi de reprendre confiance en eux et lancer une spirale positive dans laquelle le fait de travailler n’est qu’un élément parmi d’autres. On a donc monté un programme “Tous Tes Talents”, dont on a mesuré rigoureusement l’impact, et commencé à construire une expertise solide pour qualifier la situation des chômeurs, identifier leurs freins et les solutions existantes ou à inventer pour les lever, et les accompagner dans leur orientation.
La seconde, c’est que, construite initialement pour accompagner vers le repreneuriat, l’association avait développé une proposition qui, primo, redonnait envie à des publics qui considéraient avoir fait le tour de la question et ne répondait plus aux sollicitations classiques, secundo, redynamisait le parcours de retour à l’emploi d'une multitude de personnes quand bien même, elles bifurquaient en plein parcours une fois requinquées, tertio, avait provoqué la construction de méthodes et outils pour chercher et impulser des solutions innovantes favorisant l’insertion professionnelle de toutes et tous, même quand la solution n’était pas la reprise d’entreprise.
L’association a alors grossi et est devenue un laboratoire d’innovation sociale, qui s’est emparé de plusieurs enjeux majeurs pour favoriser l’insertion professionnelle. Aujourd’hui, nous mêlons recherche et action de terrain pour que l’un puisse nourrir l’autre et que nous apportions des solutions éprouvées aux besoins de notre époque en matière d’emploi.
Chez Tous Tes Possibles, notre mission est claire : combler les trous dans la raquette du retour à l’emploi pour tous ceux pour qui c’est le bon moment. Pour ce faire, nous expérimentons des solutions innovantes à destination soit des chercheurs d’emploi eux-mêmes, soit des entreprises pour la mise à jour de leurs pratiques RH, soit des acteurs de l’écosystème de l’insertion (institutionnels, service public, monde associatif,…). Nous combinons systématiquement une question de recherche et un protocole de mesure à nos actions terrain, afin d’en ressortir une démonstration qui fasse profiter au plus grand nombre de leurs retombées positives.
Combien de personnes travaillent-elles dans cette association ? Tous Tes Possibles, c’est une trentaine de salariés sur 12 territoires partout en France, épaulés par quelques bénévoles dont je fais partie et des partenaires, aussi bien publics que privés, qui nous honorent de leur confiance.
Parmi toutes les solutions que nous développons en ce moment, l’accompagnement des entreprises à mettre en place des démarches de recrutement et d’intégration plus inclusives mobilise beaucoup de belles énergies que l’association fédère. En permettant notamment aux chômeurs de tester les métiers, d’expérimenter une sensation qu’ils génèrent, de les goûter même, l’immersion peut, à la fois, confirmer s’ils s’y projettent ou non et démontrer leur vouloir-faire (et parfois même leur savoir-faire) à un employeur bien mieux que ne le ferait un CV ou une lettre de motivation.
Comment s’articule ce concept ? Le concept “Entreprise inclusive” part d’une conviction : le marché du travail s’est retourné plus rapidement que n’importe quel observateur n'a pu l’anticiper. Aujourd’hui, ce sont aux entreprises de se rendre désirables aux yeux des chercheurs d’emploi, sous peine de ne recevoir aucun CV pendant des mois sur des métiers qui ne sont pourtant pas officiellement en tension. Cette situation inattendue a surpris tout le monde et caractérise un besoin ultra-concret et très immédiat pour les entreprises. Il ne faut donc pas en faire un combat purement philanthropique. Si cela rejaillit positivement sur la société, c’est tant mieux et c’est ce qui nous motive nous, mais cela part vraiment de la résolution d’une équation économique : les postes vacants représentent un manque à gagner sociétal, parce qu’ils correspondent à des commandes refusées, donc de la valeur qui n’est pas créée, sur laquelle il n’y aura donc ni rentrées fiscales ni cotisations sociales, alors que, parallèlement, quelqu’un qui aurait pu vivre de son activité devra être pris en charge par la solidarité nationale.
Les demandeurs d’emploi, eux, préfèrent statistiquement tirer leur revenu, à revenu égal, de leur activité que de l’indemnisation, sans compter les retombées négatives liées à l’impact du chômage sur la santé, sur la réussite de leurs enfants, etc. Plus ils sont éloignés de l’emploi, plus leurs CV comportent des trous, plus leur capacité à passer la barrière de la lettre de motivation ou de l’entretien est faible… C’est une véritable spirale infernale happant des tas de gens qui avaient pourtant initialement une ferme motivation à travailler.
C’est la raison pour laquelle, chez Tous Tes Possibles, nous promouvons l’essai. Permettre aux chercheurs d’emploi de tester des métiers, même si ce ne sont pas ceux pour lesquels ils se sont formés, quand on leur a demandé de le choisir à 14 ans, pour la vie et pour le meilleur comme pour le pire. Découvrir un environnement de travail sur le tas, entouré de potentiels collègues, c’est la garantie de laisser libre cours à leur motivation à rejoindre la structure qui les accueille. Cela leur offre aussi la possibilité de démontrer leurs talents concrètement, sans nécessairement avoir à en parler, à l’oral ou à l’écrit. Et, cela permet à l’employeur de passer de la “sélection” à la “séduction”, de s’assurer ensuite du vouloir-faire du candidat, mais également, bien souvent, de cerner très concrètement ses talents.
Vous mettez en avant le concept de « vouloir-faire », plutôt que celui de savoir-faire. Comment définiriez-vous ce concept ? La majorité des demandeurs d’emploi sont très motivés à l’idée de retourner à l’emploi, ont de nombreux talents et capacités dont ils ne savent pas toujours parler, ou qui ne sont pas nécessairement tamponnés par un diplôme ou une qualification. Ils sont prêts à découvrir des secteurs, des missions, des tâches et à monter en compétences au service de projets et métiers portés par des structures qui peinent à recruter. Entre les choses qui ne s’apprennent que sur le terrain et l’abondance d’offres de formation, internes à l’entreprise ou prise en charge par ailleurs, les savoirs suivent assez facilement. Mettre la formation en étape numéro un avant de s’assurer que la personne va effectivement travailler dans le secteur, c’est mettre la charrue avant les bœufs… Et c’est malheureusement une norme qui fait que la grande majorité des gens ne travaillent pas dans le métier pour lequel ils se sont formés.
C’est de ce “vouloir-faire”, de cette motivation et cette capacité à monter en compétences, que les entreprises qui recrutent ont besoin, plus que de promesses qui jonchent les processus classiques de recrutement. Nous les épaulons à la fois dans la construction des canaux de rencontre de ces chercheurs d’emploi motivés, dans la mise en place des ressources humaines et techniques pour pouvoir leur faire tester leur métier dans de bonnes conditions et, le cas échéant, les intégrer de façon pérenne, au sein de leur structure et de leurs équipes.
Comment se passe concrètement la mise en place de la création d'un essai ? L’essai en lui-même ne demande qu’un accompagnement minimal pour mettre en place les conditions de sa réussite : sensibilisation des équipes qui vont accueillir les personnes qui testent le métier, réflexion autour des tâches hyper-concrètes qui caractérisent chaque métier, structuration de l’accueil avec l’aide d’ambassadeurs issus des équipes terrain de l’entreprise et des retours à effectuer.
En fonction des besoins de l’entreprise, nous pouvons proposer un accompagnement sur mesure, afin de diagnostiquer le processus de recrutement et d’intégration puis préconiser des évolutions adaptées. L’entreprise maîtrise entièrement le degré d’investissement (en temps de collaborateur de son côté et en accompagnement par nos équipes) que chaque brique représente et peut facilement le comparer au manque à gagner direct de chiffre d’affaires, à la perte de compétitivité vis-à-vis de la concurrence, aux tensions RH internes, etc. que représente la vacance de ses postes non pourvus.
La mise en relation entre les demandeurs d’emploi et les structures employeuses peut se faire par les canaux classiques de service public du recrutement ou via les plateformes Essai Possible et Immersion Facile. On convient d’une date pour venir tester, ou d’une entrée en PMSMP (Périodes de mise en situation en milieu professionnel) le cas échéant, et une fois la convention signée, il n’y a plus qu’à venir tester.
Combien de métiers avez-vous testés depuis le lancement de votre association ? Il est vrai que pour démontrer que « n’importe qui » peut le faire si l’entreprise est bien préparée, je teste moi-même certains de ces métiers les plus emblématiques. Tout repose sur la sensation que procurent les premières heures. Il y a ceux qui passeraient leur vie à prendre le plus grand soin des personnes âgées, ceux qui sont accros à l’odeur de l’essence dans leur garage et, moi, je sais que ce serait les métiers de bouche ou liés à l’agro-alimentaire !
J’en ai testé des dizaines depuis le lancement de l’initiative, et je compte encore en découvrir quelques-uns. Mais surtout, j’espère qu’en donnant ainsi de la visibilité à cette solution, je vais lancer un mouvement bien plus large ! Nous avons déjà des structures bancaires ou de santé qui se lancent, nous avons hâte que l’hôtellerie et la restauration en fassent de même !
Comment Tous Tes Possibles est-elle financée ? Par le passé, l’association a notamment bénéficié d’un soutien conséquent du Plan d’Investissement dans les Compétences, ce qui lui a permis d’accumuler une bonne expérience de l’accompagnement de chercheurs d’emploi. Nous sommes aussi soutenus depuis nos débuts par plusieurs fondations, par le mécénat de banques comme le Crédit du Nord (qui a notamment permis d’élaborer les outils de l’accompagnement des entreprises dont nous parlons) et des fonds d’action sociale d’AG2R LA MONDIALE, notamment.
Le marché de l’emploi s’est désormais retourné et, aujourd’hui, la rationalité économique veut que ce soient les entreprises qui soient accompagnées pour répondre à la problématique sociétale la plus criante pour elles. Plusieurs groupes de renom ont déjà fait appel à nous et prennent en charge le projet taillé sur mesure pour relever le défi qu’ils nous ont lancé.
Nos interventions se font à prix coûtant, sans marge, mais ceux qui souhaitent nous soutenir peuvent faire un don sur notre site internet : https://www.toustespossibles.fr/page-de-dons/.
Disposez-vous de partenaires ou de relais publics ? Nous travaillons dans une logique systématique de partenariat, subsidiarité et complémentarité : des acteurs formidables développent des solutions géniales partout sur le territoire. Tous Tes Possibles se propose de faire le lien entre toutes ces initiatives pour qu’elles bénéficient au plus grand nombre, favoriser ainsi l’agir ensemble et proposer des solutions innovantes aux problématiques qui ne trouvent pas encore de solution.
C’est ainsi que nous avons développé de très bonnes relations avec de nombreux acteurs publics comme les Conseils départementaux, avec lesquels nous travaillons notamment sur les solutions à proposer aux allocataires du RSA, ou les expérimentations à mettre en œuvre dans le cadre du Service Public de l’Insertion et de l’Emploi ou de France Travail. Nous travaillons aussi main dans la main avec Pôle Emploi dans de nombreux territoires, et avec les représentations de branches et de la formation, au niveau local comme national.
Comment cette innovation que vous apportez au recrutement a été perçue par les recruteurs et les candidats ? Passée la surprise du contre-pied, l’idée séduit recruteurs comme candidats. Et les premières expérimentations démontrent qu’ils ont toutes les raisons d’être séduits !
Les équipes RH constatent une plus-value, en termes de marque employeur, qui contribue à fidéliser les salariés déjà en poste, les chercheurs d’emploi y voient une opportunité qui leur permet de ne pas être réduits à un CV ou à leur incapacité à “se vendre” en entretien, et le service public est ravi que nous promouvions les instruments qu’il a conçus mais dont il n’a pas les moyens d’accompagner le déploiement au sein des entreprises.
Est-il difficile de rassurer les entreprises pour obtenir la réalisation d’un essai ? Le plus compliqué, pour certaines structures, c’est de dépoussiérer leurs méthodes de recrutement et notamment de passer outre le CV ou l’entretien. Les habitudes sont confortables mais ne produisent plus les effets qu’elles avaient par le passé.
Quand elles acceptent de jouer le jeu de l’essai, elles réalisent vite que, pour bien des missions et dans bien des situations, cela a bien plus de sens de tester le vouloir-faire que le savoir-faire.
Dans le monde de l’entreprise qui est le mien, le principe de réalisme économique transcende toutes les résistances : quand vous galérez à recruter depuis des mois et des mois, que les postes vacants s’accumulent dans votre entreprise, et que vous voyez les résultats chez les voisins, vous êtes prêts à tester puis à amplifier.
Selon vous, le mode de recrutement classique, via l’envoi d’un CV et un entretien est-il devenu obsolète ? Il faut de tout pour faire un monde, et surtout il faut savoir s’adapter aux situations et aux profils. Le CV et l’entretien ont sûrement leurs vertus pour certains profils ou métiers.
Mais dès lors qu’il s’agit de métiers ne requérant que peu ou pas de qualifications (ce qui le cas de la moitié des postes vacants à l’heure actuelle), ou de structures capables de former de nouvelles recrues, et dans la mesure où l’on évoque notamment des structures et métiers en tension, qui peinent à recruter et souhaitent pouvoir ouvrir leurs embauches à un nouveau vivier de personnes, dont certaines qui ne “cochent pas les bonnes cases” et ne passeront jamais au tamis de la sélection par CV ou entretien, le mode de recrutement classique ne peut pas permettre de répondre à ces enjeux, voire devient contre-productif.
Cela permet également de contourner ou surmonter certains mécanismes qui font obstacle à des candidatures hors des normes, tout en ramenant les choses à l’essentiel : est-ce que ça matche sur le tas ou pas ? À ce titre, ce système lutte plus efficacement contre une forme de discrimination que le CV anonyme.
Votre concept a-t-il toutefois des limites ? Je ne confierais probablement pas ma vie ou celle de mes proches à un chirurgien sans qualification et à l’essai, ni la sécurité de ma centrale nucléaire à un stagiaire en immersion. De la même manière, il n’y a aucune garantie que la première tentative, ni même la deuxième ou la troisième soient concluantes, pour le candidat comme pour l’employeur. Par contre, 100% des gagnants ont tenté leur chance, comme dirait l’autre, et il ne faut pas avoir peur d’enchaîner ces trois échecs avant de tomber sur la perle la quatrième fois.
Nous avons bien conscience que ce n’est pas la panacée, que deux millions de personnes ne vont pas trouver un emploi en un claquement de doigt, mais si ne serait-ce que 150.000 à 200.000 emplois par an (c’est à peu de choses près ce dont on se parle ici) peuvent trouver preneur ainsi, ce sera vraiment un système gagnant-gagnant pour les entreprises, les chômeurs de certaines catégories qui ne font que regarder impuissamment les trains passer et la société dans son ensemble.
Qu’est-ce qui est indispensable au bon fonctionnement de ce concept ? Il faut tout d’abord que l’entreprise joue pleinement et sincèrement le jeu : qu’elle se prépare à accueillir l’essai, qu’elle permette aux équipes de s’approprier l’initiative, qu’elle n’essaie pas, malgré tout, de faire passer un entretien aux demandeurs d’emploi, et qu’elle travaille en profondeur ses prérequis ultra-concrets pour effectuer les tâches nécessaires à la réalisation de ses missions (aimer se lever tôt le matin, aimer parler de la pluie et du beau temps avec les clients tout en faisant son travail, aimer travailler dehors par tous les temps, aimer être seul face à une machine pendant sept heures, etc.).
Ensuite, il est indispensable que la situation des demandeurs d’emploi qui se lancent dans l’essai soit bien qualifiée en amont. Les freins auxquels ils sont confrontés ne doivent pas empêcher la réalisation de l’essai et sa transformation en embauche pérenne (et là-dessus, pour donner quelques exemples, la solution peut aussi bien venir d’un service public réactif et conciliant, d’une association qui sait adapter ses conditions de prise en charge lorsque la signature d’un contrat de travail est un critère préalable ou de l’employeur qui met à disposition son parc de véhicule de service les trois premiers de l’embauche, le temps que la personne puisse avoir sa solution de mobilité), qu’ils soient accompagnés à la levée de leurs freins sociaux et en matière de prévention santé, et que leur motivation soit avérée.
Enfin, croire à l’essai est indispensable. Il faut savoir qu’il peut aboutir à une embauche, mais que lorsqu’on goûte, parfois on n’aime pas, que ce n’est pas grave, parce que d’autres aimeront et qu’un autre essai va prendre le relais. Ce n’est pas moins efficient qu’enchaîner des entretiens d’embauche avec des profils qui ne correspondent pas à ce que l’on cherche ou à ne trouver personne pendant des mois par les méthodes de recrutement classiques.
Collaborez-vous avec l’hôtellerie de luxe ? Pas encore, mais nous sommes prêts à répondre à toutes vos sollicitations !
Quelles seront les prochaines évolutions de Tous Tes Possibles ? Malheureusement ou heureusement, selon la moitié du verre que l’on regarde, les défis à relever en matière d’insertion professionnelle sont légion (réforme du RSA, mise en place de France Travail, intégration gagnant-gagnant des migrants, revalorisation hors salaires de métiers à haute valeur sociétale comme l’accompagnement du bien-vieillir, …) et Tous Tes Possibles a donc de nombreux sujets sur le feu.
Concernant spécifiquement le fait de promouvoir l’essai comme solution pour embaucher dans les secteurs en tension et plus globalement l’accompagnement des entreprises à se rendre plus inclusives, nous lançons des accompagnements d’entreprises sur plusieurs territoires et dans plusieurs secteurs d’activité. Toute une équipe est à pied d’œuvre sur le sujet et nous n’avons donc aucun frein à la poursuite de cette dynamique. Contactez-nous pour faire partie des prochains partenaires essai compatibles !
Journaliste depuis 20 ans, Guillaume est un inconditionnel des lieux exclusifs où se mêlent confort, qualité de service et gastronomie. Le tout, teinté d’une simplicité et de sourire qui sont l’apanage du luxe ultime.