INTERVIEW – ALAIN ELLOUZ, FONDATEUR D'ATELIER ALAIN ELLOUZ : « LA CRÉATIVITÉ EST AU CŒUR DE NOTRE ATELIER, C'EST UN PROCESSUS EN MOUVEMENT PERPÉTUEL » (France)
« Je n’emprunte jamais des chemins similaires aux autres ; je préfère chercher à dépasser les limites de ce qui est considéré par les autres comme impossible. L'inconnu est mon terrain de jeu ! » |
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INTERVIEW – ALAIN ELLOUZ, FONDATEUR D'ATELIER ALAIN ELLOUZ : « LA CRÉATIVITÉ EST AU CŒUR DE NOTRE ATELIER, C'EST UN PROCESSUS EN MOUVEMENT PERPÉTUEL » (France)
« Je n’emprunte jamais des chemins similaires aux autres ; je préfère chercher à dépasser les limites de ce qui est considéré par les autres comme impossible. L'inconnu est mon terrain de jeu ! » |
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Interview de Christopher Buet le 25-05-2023
L’adage veut que les plus belles histoires soient gravées dans le marbre. Pour la sienne, Alain Ellouz a choisi une pierre différente : l’albâtre. Un minéral à l’apparence laiteuse aussi, mais bien plus tendre et modelable, déjà utilisé dans l’Antiquité pour façonner des vases à parfum.
En 1995, l’artiste découvre ce minéral dont la translucidité le fascine autant que les possibilités qu’il entrevoit. L’évidence le frappe, l’albâtre n’est pas reconnu à sa juste valeur et offre un horizon à ses velléités créatives de jeune sculpteur. Après 10 ans à le travailler, l’idée germe d’en faire la base de ses projets et surtout de lui ouvrir de nouvelles perspectives plus contemporaines.
Sa rencontre avec la designer Marion Biais-Sauvêtre, fraîchement diplômée des Arts décoratifs de Paris, le conforte dans ses intuitions et l’amène à pousser sa réflexion créative autour de nouvelles exigences techniques et esthétiques. C’est là qu’il fonde l’atelier à son nom, où travaillent aujourd’hui 45 personnes, et se lance à la conquête du marché du luxe.
L’artiste joue alors des propriétés uniques de l’albâtre dans un jeu de lumières et de transparences, à travers des produits sobres et élégants s’intégrant dans n’importe quel intérieur, tout en lui apportant une touche de sophistication. Des luminaires, des lames pour former un paravent redessinant une pièce ou encore du mobilier, tout est matière à exprimer sa créativité et éprouver le caractère métamorphe de l’albâtre.
S’appuyant sa connaissance pointue de son élément, Alain Ellouz développe son savoir-faire et laisse libre cours à son imagination pour proposer des réalisations toujours plus audacieuses et complexes, à la hauteur des lieux qui le sollicitent. La Messardière ou l'Hôtel du Cap-Eden-Roc, et de nombreux autres se laissent séduire par l’artiste français, à l’approche symbiotique et dont le nom se murmure dans les hôtels de luxe.
Surtout, il se diversifie en s’attaquant au cristal de roche, lui aussi translucide et à la grande pureté, et s’exporte. Un showroom est ouvert à Londres dès 2016, puis un autre à New York afin d'honorer des commandes qui affluent du monde entier.
Pour le Journaldes Palaces, l’artiste parisien met en lumière trois décennies au cours desquelles il a cherché à repousser les limites de ses créations pour exprimer une démarche artistique qui ne laisse clairement pas de marbre.
Journal des Palaces :Quelle est votre vision du luxe ?
Alain Ellouz: Le luxe signifie pour moi pureté et beauté uniques. C’est donner l'inédit aux esthètes ; procurer quelque chose de rare à ceux qui en apprécient la valeur.
De quoi vous inspirez-vous pour créer ?
Je suis un passionné de tous les musées d’art contemporain du monde. Cependant, je ne m'inspire pas d’un artiste ou d’un autre, je regarde profondément leurs créations. L’inspiration est comme le vent, il faut laisser la fenêtre de son esprit ouverte pour que le vent entre. Il faut rester optimiste et transformer les difficultés en opportunités.
Vous avez récemment lancé la gamme MY. En quoi consiste-t-elle ?
La gamme MY comporte deux appliques en albâtre rétro-éclairé de hauteur différente, 45 et 65 cm, minimalistes et intemporelles. Elles se composent de deux éléments fins d’albâtre réunis dans une symétrie parfaite par une tige en acier noir. L’éclairage diffus de chacune des deux parties se répond dans un jeu de lumière. Elles sont parfaites dans un hôtel de montagne, en écho aux sommets enneigés, installées dans un lobby ou dans unechambred'hôtel.
Vous avez développé des luminaires autour de l’albâtre et du cristal. Pourquoi travaillerces deux matériaux ? Quels sont leurs avantages et inconvénients ?
Ces deux pierres se révèlent dans la lumière. L'albâtre est une pierre magique et lumineuse. Il semblerait que cette pierre vous raconte une histoire différente à chaque fois. La pierre est vibration ; la résonance de l'albâtre apporte la sérénité. Une cristallisation spécifique et rare du gypse crée la texture unique et l'aspect translucide de l'albâtre.
La pierre naturelle offre une myriade de motifs et de nuances. Fluide ou cristallisée, blanche ou ocre, chaque pièce d'albâtre est unique. Après une sélection rigoureuse, nous façonnons et concevons l'albâtre pour créer des pièces qui mettent en valeur les qualités esthétiques uniques de chaque pierre.
Issu d'une gemme, le cristal de roche est comparable à un diamant. Les plus beaux cristaux de roche sont taillés à Madagascar, où nous sélectionnons les pierres les plus fines. Le cristal de roche nous emmène dans un tout autre univers lumineux. Sa translucidité, alliée à son élégance naturelle, a inspiré nos designers à développer des lustres contemporains, rappelant les prismes de bijoux, tous assemblés à la main dans nos ateliers. La finesse de réalisation et la maîtrise de la lumière font des créations en cristal de roche des pièces uniques.
Vos créations vont au-delà du simple luminaire et s’apparentent à des sculptures, presque des œuvres d’art à part entière. En quoi cela vous rend-il différent de vos concurrents ?
Nous avons inventé un nouvel artisanat d'art qui associe le geste manuel précis des sculpteurs et ébénistes de la pierre, aux technologies de pointe, de maîtrise de la lumière et de protection de l'albâtre. Nos sculpteurs explorent des formes sculpturales, des textures inédites et font dialoguer la forme et la lumière. Puis viennent les ébénistes qui œuvrent la pierre comme le bois :calepinages, coupes, assemblages, marqueteries…
Enfin, nos traitements Stonelight, une série d’applications de résines et vernis, nous permettent de relever le défi d’intégrer l’albâtre dans des ouvrages exigeant solidité et imperméabilité. Nos finitions sont étudiées pour améliorer aussi la diffusion de la lumière et les effets d’éclairage.
La sélection de chaque pièce de pierre, la précision du geste, une rigueur sans faille, la qualité d'exécution et d'installation des ouvrages permettent à l'Atelier Alain Ellouz de s'inscrire dans le patrimoine français des meilleurs artisans d'art et d'être le seul au monde à avoir une totale maîtrise de l'albâtre.
Dans quelle mesure pourrait-on définir votre travail comme celui d’un orfèvre scénographe ?
Nous réalisons des luminaires sur-mesure et des ouvrages d'architecture audacieux en collaboration avec les plus grands designers internationaux et les plus belles marques de luxe. Nous relevons le défi d'intégrer l'albâtre dans des ouvrages monumentaux : parois de plusieurs dizaines de mètres de haut, luminaires sur plusieurs étages dans une cage d'escalier...
Pour leflagshipChaumet de la place Vendôme, nous avons réalisé une gemme taillée à la main qui vient abriter les plus belles parures de la marque. Toutes nos créations contribuent à scénariser les plus belles marques ou les plus beaux lieux.
Quelle est la création la plus exceptionnelle que vous avez effectuée ?
Nos deux nouveaux luminaires Infinity 16 et Illusion illustrent parfaitement nos savoir-faire. Une recherche formelle fondée sur un vocabulaire de formes simples, alliée à une prouesse technique. Infinity 16, par exemple, déploie quatre grandes boucles d'albâtre rétro-éclairé sur trois mètres d'envergure. Quant à Infinity Illusion, suivant l’angle selon lequel on contemple ce luminaire, une nouvelle configuration aléatoire apparaît. Une véritable illusion d'optique.
Votre réflexion artistique prend-elle également en compte une dimension responsable ?
Fondée sur le principe vertueux de l'éco-conception, notre collection EDITION valorise les plus petites pierres d'albâtre extraites de même que les grands blocs. Nous transformons cette richesse de la terre en véritable œuvre d'art !
Quelle est la politique RSE de l’entreprise ?
Nous formons en interne des jeunes à nos métiers d'art si particuliers : les ébénistes de la pierre. Nous favorisons toujours la promotion interne et nous faisons évoluer rapidement nos jeunes à des postes clés.
Avec quels établissements prestigieux collaborez-vous ?
Nous collaborons avec les plus grandes marques de luxe pour leurs boutiques (Dior, Chanel, Guerlain, Louis Vuitton, Chaumet, Rolls-Royce, Jaeger Lecoultre, Van Cleef...), des hôtels de prestige comme La Messardière, l'Hôtel du Cap-Eden-Roc, Maison Villeroy, les hôtels SOFITEL Legend, le Mandarin Oriental, Four Seasons Residence de Los Angeles... Mais aussi pour des résidences privées de personnalités, comme le roidu Maroc, le roi d'Arabie Saoudite.
Quelles sont les exigences des hôtels de luxe avec lesquels vous collaborez ?
Les hôtels de luxe avec lesquels nous collaborons ont une exigence très forte en matière de sécurité. Nos créations pèsent souvent des tonnes et nous devons assurer la solidité et la sécurité dans le temps de nos ouvrages. Notre bureau d'étude comptesix personnes qui calculent etvérifient tout ! Enfin, nos installateurs défient les lois de la pesanteur, assemblent sans joint apparent et interviennent partout dans le monde pour assurer aux ouvrages de l'atelier, qualité, sécurité et pérennité. Nous apportons aux hôtels quelque chose d'unique, ainsi qu'une part de mystère.
Comment s’articule votre travail avec les hôteliers et les architectes ? Jusqu’où poussez-vous la réflexion ?
Le scénario est donné par les architectes d'intérieur et les hôtels avec lesquels nous travaillons. Tout le développement est ensuite assuré par notre bureau dedesignpuis notre bureau technique. Tous les calculs sont faits en interne. À chaque étape du projet, nous travaillons main dans la main avec nos clients.
Pour la Maison Villeroy, nous avons imaginé l’impossible. Un mât de 25 mètres de hauteur sur lequel sont arrimées 45 sphères d'albâtre en grappe ou encore une structure imposante de métal et d'albâtre pesant plus d’une tonne et suspendue au toit ouvrant d’une résidence privée de Saint-Jean-Cap-Ferrat.
Quels sont vos prochains projets de développement ?
Dans notre showroom new-yorkais, nouslançons en avant-première,à l'occasion de la New-York Design Week, notre première capsule artistique qui revisite nos collections. Puis, à l'automne prochain, nous allons ouvrirun flagship à Paris, à mi-chemin entre galerie d'Art et showroom, dans un lieu magnifique sur les bords de Seine, à quelques pas de la Monnaie de Paris. Enfin, nous souhaitons créer une unité de production à Chicago, au plus près de nos clients américains, notre premier marché.
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