CRISE DU COVID-19 ET SOUTIEN AUX RESTAURANTS : LA VENTE À EMPORTER PEUT SAUVER LES RESTAURANTS (France)
Par Olivier Gergaud, Professeur et directeur du centre d’excellence Food, Wine and Hospitality, KEDGE |
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CRISE DU COVID-19 ET SOUTIEN AUX RESTAURANTS : LA VENTE À EMPORTER PEUT SAUVER LES RESTAURANTS (France)
Par Olivier Gergaud, Professeur et directeur du centre d’excellence Food, Wine and Hospitality, KEDGE |
Catégorie : Europe - France - Économie du secteur
- Tendances, avis d'expert
Ceci est un communiqué de presse sélectionné par notre comité éditorial et mis en ligne gratuitement le 18-05-2020
En France, on estime à date qu’un tiers des restaurants risque de faire faillite. Le secteur vit actuellement une crise économique sans précédent en dépit du soutien massif de l’État : report puis annulation de charges sociales, dispositif de chômage partiel. Ces aides permettent temporairement de couvrir les charges variables des entreprises fermées, mais elles n’ont pas pour vocation d’assumer les charges fixes. Selon Olivier Gergaud, la relance post confinement du secteur de la restauration peut s’opérer par la généralisation rapide de la vente à emporter.
Le soutien public ne peut être que temporaire car les moyens de l’État (qui proviennent des taxes payées par le contribuable français) sont limités. Il est donc primordial aujourd’hui d’imaginer des soutiens plus pérennes, car la crise sanitaire pourrait encore durer.
Qui d’autre que l’État et les compagnies d’assurance peut sauver les restaurants ? De fait, la solution se trouve entre les mains des consommateurs. Plusieurs solutions sont envisageables.Les précommandes via des plates formes de soutien ?Les consommateurs, clients fidèles, via l’initiative de sites tels que "Sauve ton resto" ou "J’aime mon bistrot" ont déjà apporté un soutien appréciable à leurs restaurants préférés en passant des précommandes. Mais ce système a ses limites, les consommateurs ne vont pas continuellement alimenter ces sites, d’autant que le risque de faillite croît au fil du temps et le risque de perdre les avances faites aux commerçants avec.Livraison à domicile ou vente à emporter ?Des plateformes dédiées comme Just Eat, Deliveroo ou Uber Eats sont communément utilisées dans notre pays pour les livraisons à domicile en plus des flottes de livreurs des grandes chaînes de restauration rapide. Il faut cependant savoir que les restaurants reversent un peu plus de 30% du montant de la commande à ces intermédiaires. Une telle « taxe », dissuasive pour bon nombre de restaurants, s’explique par la concentration de l’offre entre les quelques opérateurs principaux. Il apparait donc primordial que les consommateurs privilégient la vente à emporter pour augmenter les chances de survie des restaurants plutôt que la livraison à domicile.
La généralisation de la vente à emporter apparait donc comme une solution à mettre en œuvre au plus vite. Seulement, certains freins peuvent ralentir voire disuader sa mise en place.
Les consommateurs, trop nombreux encore, ignorent quels établissements pratiquent à date la vente à emporter. Pour pallier ce problème, il suffit que les restaurants mettent à jour leur profil Trip Advisor pour les informer du rétablissement ou de la création de ce service. Mieux encore, des solutions innovantes voient le jour comme restaurantdrive.fr, une initiative bon marché et néanmoins très qualitative de Loic Viandier, qui propose aux restaurants de créer leur site de vente à emporter en quelques clics, et d’être ainsi opérationnels en quelques heures seulement. Les consommateurs ignorent aussi, et c’est plus embêtant encore, les conditions sanitaires dans lesquelles les plats sont cuisinés. L’intervention rapide d’organismes de certification serait utile pour apporter de précieux conseils aux restaurateurs et s’assurer que tout est mis en œuvre pour protéger la santé des clients. Le coût, probablement modeste, de ces interventions pourrait être pris en charge par l’État. Un investissement nécessaire pour générer à nouveau un chiffre d’affaire grâce à la vente à emporter et réduire à terme les aides.
Les producteurs craignent aussi de perdre les bénéfices du chômage partiel, aujourd’hui essentiel au paiement du salaire des employés non occupés. Comme le suggérait récemment les économistes Jean-Benoît Eymeoud et Etienne Wasmer, un assouplissement, au moins temporaire, des conditions de versement de l’allocation retour à l’emploi serait nécessaire. Rappelons qu’il n’est pas autorisé de bénéficier du chômage partiel tout en travaillant ; ce qui paraît logique en temps normal mais qui freine à date la reprise d’activités de nombreux établissements. La mise en place de la vente à emporter induira également des frais importants d’achat de matériel divers pour certains. Ces charges supplémentaires, en période de forte incertitude sur la demande, n’encouragent pas les restaurateurs à se lancer dans l’aventure. Une aide de l’État, sous la forme d’une avance de frais par exemple, pourrait s’avérer utile.La restauration en extérieur ?Une étape supplémentaire pourra être franchie dans quelques temps en autorisant les restaurants à investir, gracieusement, l’espace public (e.g. les trottoirs, places de parking, etc.). Les restaurants ont besoin d’espace et les beaux jours sont presque là. Aider les restaurants à s’approprier l’espace public est un projet prometteur à l’étude aux États-Unis. Il pourrait, de ce côté-ci de l’Atlantique être facilité par l’appui des municipalités qui, à n’en pas douter, souhaitent éviter les faillites d’établissements qui assurent en partie leur attractivité.
Olivier Gergaud est à votre disposition pour toute demande d'interview ou reportage sur ce sujet d'actualité. A propos d’Olivier Gergaud :Olivier Gergaud est professeur d’économie à KEDGE et chercheur affilié au LIEPP de Sciences Po. Il a obtenu un doctorat de l’Université de Reims en 2000 pour une thèse récompensée par l’Association française de science économique (AFSE). Olivier est également titulaire d’une habilitation à diriger des recherches obtenues à Sciences Po en 2009. Les travaux d’Olivier concernent de nombreux domaines de l’économie appliquée (culture, vin, restaurants, sport, environnement, vote, etc.) mais aussi le marketing et la RSE. Professeur invité dans de nombreuses universités européennes (Sciences Po Paris, Université libre de Bruxelles), nord-américaines (NYU, UCLA, HEC Montréal) et en Océanie (University of Canterbury), Olivier a également reçu plusieurs prix honorifiques comme le Duncan Black Prize pour le meilleur article publié dans Public Choice par un chercheur sénior en 2019 ainsi que le prix du Président lors de la 12e conférence internationale de l’Association for Cultural Economics International (ACEI). Il est également membre du comité de rédaction du Journal of Wine Economics et du Journal of Prediction Markets. Olivier est l’auteur de près de 30 articles publiés dans des revues internationales à comité de lecture comme Economic Journal, Economic Inquiry, Journal of Portfolio Management, Oxford Bulletin of Economics and Statistics, Journal of Economic Behavior and Organization, Family Business Review, Journal of Sports Economics, Journal of Wine Economics, Journal of Cultural Economics. La plupart de ces travaux ont bénéficié d’une large couverture médiatique dans des médias tels que The New York Times, The Guardian, The Sunday Telegraph, The Washington Post, The Los Angeles Times, The Financial Time, Le Monde, France 5, France 2, Harvard Business Review, etc. A propos de KEDGE :KEDGE est une École de management française de référence présente sur 4 campus en France (Paris, Bordeaux, Marseille et Toulon), 3 à l’international (2 en Chine à Shanghai et Suzhou, et 1 en Afrique à Dakar) et 3 campus associés (Avignon, Bastia et Bayonne). La communauté KEDGE se compose de 14 800 étudiants (dont 25% d’étudiants étrangers), 192 professeurs permanents (dont 44% d’internationaux), 291 partenaires académiques internationaux et 70 000 diplômés à travers le monde. KEDGE propose une offre de 36 formations en management et en design pour étudiants et professionnels, et déploie des formations sur-mesure pour les entreprises au niveau national et international. Membre de la Conférence des Grandes Ecoles et accréditée AACSB, EQUIS et AMBA, KEDGE Business School est une institution reconnue par l'Etat français, avec des programmes visés, et labellisée EESPIG. KEDGE est classée par le Financial Times 31ème meilleure Business School en Europe et 39ème mondiale pour son Executive MBA.
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