INTERVIEW – GEORGE C. GAITANOS, CHIEF OPERATING & SCIENTIFIC OFFICER DE CHENOT : « LE LUXE, C'EST SE PRIORISER SOI-MÊME » (Suisse)
Réputée pour ses programmes alliant santé et bien-être, la méthode Chenot sort ses clients de leur zone de confort, suscitant ainsi un besoin encore plus grand d’attentions et d’hospitalité |
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INTERVIEW – GEORGE C. GAITANOS, CHIEF OPERATING & SCIENTIFIC OFFICER DE CHENOT : « LE LUXE, C'EST SE PRIORISER SOI-MÊME » (Suisse)
Réputée pour ses programmes alliant santé et bien-être, la méthode Chenot sort ses clients de leur zone de confort, suscitant ainsi un besoin encore plus grand d’attentions et d’hospitalité |
Catégorie : Europe - Suisse - Interviews et portraits
- Interviews - Les Leaders du secteur
Interview de Vanessa Guerrier-Buisine le 08-09-2023
Chenot est renommé dans le monde entier pour son offre unique qui connecte santé et bien-être, pour des voyageurs en quête d’une jeunesse prolongée. Pour tenir ses promesses, Chenot a déployé ses parcours de soins au sein d’un écrin favorisant la déconnexion et le bien-être de ses hôtes.
Au Chenot Palace Weggis, les voyageurs sont accueillis comme s’ils séjournaient dans un hôtel de luxe, à quelques exceptions. Ici, la gastronomie est nécessairement combinée aux programmes adoptés par les clients. Ainsi, les menus sont hypocaloriques, et un client ne pourra pas consommer d’alcool pour accompagner son repas. En chambre, même principe, l’espace et les équipements sont pensés exclusivement pour soutenir l’efficacité des programmes.
En revanche, plus encore que dans un hôtel de luxe, le Chenot Palace doit s’attacher un personnel bienveillant et patient, un personnel accompagnant le séjour de ses hôtes, dont les organismes sont mis à rude épreuve.
Après le décès de son emblématique fondateur Henri Chenot, le groupe bénéficie aujourd’hui de l’expertise d’un scientifique à sa tête. George C. Gaitanos, titulaire d’un doctorat en métabolisme musculaire, est rompu à l’exercice de la remise en forme des athlètes de haut niveau.
Pour comprendre la méthode Chenot et les secrets de son succès, le Journal des Palaces a pu échanger avec George C. Gaitanos, Chief Operating & Scientific Officer de Chenot.
Journal des Palaces : Comment décririez-vous le Chenot Palace Weggis, et quel est l'ADN du Chenot ?
George C. Gaitanos : Le Chenot Palace Weggis est une destination, une retraite de santé et de bien-être. Les gens viennent dans un but précis. Ils doivent donc d'abord choisir leur programme et nous devons les accepter, car il y a parfois des contre-indications à suivre le programme. Ils peuvent alors réserver leur chambre. Il s'agit d'un processus inversé par rapport aux hôtels, où l'on réserve sa chambre et où l'on s’occupe ensuite des réservations au spa et ailleurs.
Nous appelons cela une retraite de santé et de bien-être, mais on peut également parler d’une clinique de santé et de bien-être, car nous parlons de promouvoir notre santé, d’améliorer notre fonctionnalité et de devenir plus résilients.
Les clients souhaitent s’occuper d’eux, ils ont donc besoin d'un environnement agréable. Ici, nous avons l'hôtel, les services, et toutes les équipes qui les entourent en apportant une chaleur humaine. Nous avons créé des environnements où nos clients peuvent réellement expérimenter la méthode ou les traitements que nous pratiquons, dans un lieu agréable, et le design et l'architecture doivent aussi solliciter leurs sens.
Nos clients doivent se sentir bien. Qu'il s'agisse d'hôteliers ou de professionnels de la santé, nos équipes travaillent très bien en synergie.
Quelle est votre vision du luxe ?
Le luxe, c'est se prioriser soi-même, donner du sens au temps que l’on consomme, qu'il s'agisse d'expériences ou de création de souvenirs. En fin de compte, nous voulons simplement être en bonne santé.
À Weggis, les jeunes générations sont de plus en plus demandeuses, et j'en suis très heureux, car elles commencent à se placer en priorité. Les jeunes deviennent même plus égoïstes, dans le bon sens du terme, en prenant soin d'eux-mêmes, car ils comprennent qu'ils peuvent être plus productifs, qu'ils peuvent donner plus de sens à leur vie. Ils comprennent qu’ils peuvent vieillir mieux, et en bonne santé.
Je pense que c'est cela le luxe. Il s'agit de se fixer des priorités, de trouver le temps de faire les choses. Je pense que le temps est réellement ce qui compte le plus.
Après une carrière essentiellement tournée vers le monde du sport, pourquoi avez-vous rejoint Chenot ?
Je combinais plusieurs activités, comme la gestion de clubs de santé, à l’instar du Nike’s Health Club à Athènes. J'ai créé ma propre structure et certains de mes clients donnaient la priorité à leur travail, étaient très stressés. Mais, ils comprenaient qu'ils épuisaient leurs batteries et qu'ils devaient donc prendre un virage, se placer en priorité.
En arrivant chez Chenot, c'était le même type d'environnement et de clientèle. L'ADN était très important. Nous partageons la même direction. Je pense que ce que M. Chenot a créé, et moi-même, nous étions sur la même ligne et avions la même vision. Ici, nous pouvons essayer de faire en sorte que les clients tirent le meilleur parti de la vie. C'était une opportunité pour moi de venir ici.
Aujourd'hui, vous avez un Chenot Palace en Suisse, le Weggis, et un en Azerbaïdjan, le Gabala. Comment choisissez-vous vos destinations, et avez-vous des projets de développement, si oui, dans quelles destinations ?
Lorsque je suis arrivé, Chenot était basé à Lugano, ce n'était qu'un bureau. Lorsque l'occasion s'est présentée d'avoir un Chenot Palace en Suisse, ici au bord du lac des Quatre-Cantons, nous avons évidemment déménagé les bureaux. C'est une grande opportunité pour notre société internationale, car nous gérons mieux les installations ici. Nous disposons d’un grand show-room pour montrer notre travail aux investisseurs potentiels. C'est ici que nous faisons notre recherche et notre innovation, que nous essayons de nouvelles choses que nous appliquons et que nous exportons ensuite dans d'autres pays.
Par ailleurs, le projet en Azerbaïdjan visait à attirer le marché russe, ceux qui ne peuvent pas entrer dans l'UE et en Suisse.
Nous avons des projets que je ne peux pas révéler. Nous sommes, ceci dit, dans une phase de planification en Espagne, à Marbella.
Pourquoi parler d'un palais plutôt que d'une clinique ?
Je pense que, dans l'esprit des gens, le terme « clinique » désigne tout ce qui est nécessaire pour traiter les maladies. Ici, il s'agit uniquement de promouvoir la santé. Ainsi, moins on utilise de mots qui renvoient vers une conception passéiste, et plus on essaie d'en trouver de plus modernes, comme le concept de bien-être en matière de santé, mieux c'est.
Il s'agit de prendre soin, au plus haut niveau. Nous nous occupons de l'individu, ce qui est très important. Le corps est un système, pas des parties individuelles. Lorsque vous allez dans une clinique, on traite de manière ciblée. Ici, nous nous occupons de bien-être et le bien-être est un système, c'est le corps dans son entièreté. On ne peut pas déconnecter le corps et l'esprit. Lorsque vous créez des émotions, il y a un impact sur le corps qui peut créer un traumatisme. Quand vous impactez votre corps, vous affectez l'esprit.
Cela signifie-t-il que l'hôtellerie de luxe au sens large est bonne pour les gens, car elle crée des émotions et des expériences agréables ?
Je pense que si vous créez de véritables expériences, oui. Mais, si vous buvez deux bouteilles de champagne et que vous mangez un repas copieux, ce n'est pas une bonne expérience. Vous vous sentez peut-être bien, mais ce que cela se traduit dans le corps est une autre histoire.
Vos clients ont-ils des exigences en matière de confort dans les chambres ? Quelle attention portez-vous à l'expérience hôtelière en complément des programmes Chenot ?
L'offre d'hospitalité est excellente, l'hébergement luxueux, à différents niveaux, des chambres individuelles aux suites. Ici, le design est minimaliste, notre architecte Davide Macullo travaille, en effet, beaucoup sur la perception de l'espace. Nos clients veulent un espace où ils peuvent vraiment libérer les bonnes hormones, afin d’optimiser leur expérience. Lorsque vous sortez de votre zone de confort, émotionnellement, vous pouvez devenir agressif, dans les premiers jours, donc vous avez absolument besoin d'avoir des personnes bienveillantes pour gérer la situation, et vous voulez être dans un espace où vous pouvez mieux gérer votre état.
L'alimentation fait également partie de notre méthode. Imaginez que nous réduisons l’apport quotidien à 850 calories. Nous créons en conséquence une expérience émotionnelle pour compenser. C'est très important. Notre service est comparable à celui d'un restaurant étoilé. Notre chef, Ettore Michele Moliteo, et son équipe, créent des menus végans fantastiques, pour favoriser cette expérience émotionnelle. La façon dont les plats sont dressés et le soin apporté à l’art de la table, permettent par ailleurs de prendre très bien soin de nos clients.
Quels sont les profils de vos clients ? Quel est le pourcentage de vos clients fidèles ?
Nous avons beaucoup d'habitués, environ 60 % des clients. Ils reviennent parfois deux fois par an.
Ce sont des personnes qui veulent se faire du bien, qui comprennent l'intérêt de sortir de leur quotidien, de leur zone de confort.
Comment composez-vous vos équipes ? Quels sont les profils les plus recherchés ? Y a-t-il des traits de personnalité que vous attendez de vos équipes ?
Nous sommes dans le secteur de l'hôtellerie de luxe, le défi est de savoir comment faire comprendre à un médecin ou à un professionnel de la santé ce qu'est l'hôtellerie de luxe et comment faire comprendre à un hôtelier ce qu'est la médecine.
Lorsque nous recrutons, nous recherchons des personnalités, pas uniquement des compétences. Il faut bien sûr de l'expertise, en particulier pour un médecin, qui a besoin de références. Mais, nous recherchons avant tout des personnes capables de communiquer, d'entrer en contact avec les clients, de les comprendre. Cette approche doit être holistique, elle doit être authentique. Ce sont des éléments très importants que nous recherchons lorsque nous interviewons des personnes.
Trouvez-vous facilement ces profils ?
Non. Nous avons une marque forte, donc cela pourrait être différent pour nous, mais c'est peut-être plus difficile pour nous parce que nous sommes dans un environnement spécial, avec une thématique de santé. De nombreuses personnes du secteur de l'hôtellerie nous connaissent, cela dit.
C'est un grand défi de nos jours. Les gens sont prêts à travailler moins, à prendre plus de temps pour eux, ils veulent voyager. C'est ce que je constate chez les jeunes, lorsque je peux assister à certains entretiens. Bien que cela rende notre travail plus difficile, je pense que c'est très bien. Nous assistons à un vrai changement.
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