DAMIEN BASTIAT, DU PAYS BASQUE AU SOMMET D'ALMAE COLLECTION
Le Journal des Palaces a rencontré Damien Bastiat, récemment nommé Directeur Général du groupe Almae Collection. Portrait d'un hôtelier qui met sa passion au service des autres. |
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DAMIEN BASTIAT, DU PAYS BASQUE AU SOMMET D'ALMAE COLLECTION
Le Journal des Palaces a rencontré Damien Bastiat, récemment nommé Directeur Général du groupe Almae Collection. Portrait d'un hôtelier qui met sa passion au service des autres. |
Catégorie : Europe - Interviews et portraits
- Les Leaders du secteur
Article rédigé par Vanessa Guerrier-Buisine le 17-03-2023
Damien Bastiat est le reflet d’une hôtellerie qui fait évoluer ses talents et lui offre des perspectives de carrière d’exception. Le quarantenaire, sorti en 1997 des bancs de l’école hôtelière de Cap Breton dans le Sud-Ouest de la France, a été fraîchement nommé directeur général de la collection d’hôtels Almae.
La première rencontre avec Damien Bastiat est franche et naturelle. L’homme incarne la légendaire bonhommie du sud-ouest et porte en lui les valeurs fondamentales de l’hospitalité. Sourire et sérieux s’entremêlent pour laisser place à des échanges passionnants sur la philosophie du service, de la relation client.
À seulement 15 ans, le jeune Bastiat entre à l’école hôtelière Louis Darmante au Cap Breton. Madame Labat, une de ses professeurs, note rapidement un intérêt pour le métier et un enthousiasme bienvenu. « Elle a dû me forcer la main pour me faire entrer en stage au Relais de la Poste Relais & Château, un restaurant deux étoiles à Magescq dans le Sud-Ouest » se remémore Damien Bastiat. Il découvre alors les charmes d’une toute petite maison dans laquelle les clients reviennent pour les échanges humains, « qui font la spécificité du métier » rappelle-t-il.
Après une échappée à l’Hôtel du Palais à Biarritz, il réalise son attachement et son besoin d’évoluer dans un hôtel à taille humaine, où le lien entre les collaborateurs et avec les clients est plus « personnel ».
Conscient de la nécessité de parler anglais pour pleinement évoluer dans ce métier, il s’envole pour six mois en Angleterre… un séjour qui se prolongera pendant plus de huit ans. « Je suis parti pour la langue, et je me suis finalement perfectionné dans ce métier » s’amuse-t-il à dire.
« Je suis parti acquérir une langue, et je me suis finalement perfectionné dans ce métier »
Il épouse la culture anglo-saxonne, qui lui offre non seulement des perspectives, mais un accompagnement plus important avec des formations « très bénéfiques ». En 2006, il entre comme maître d’hôtel dans le restaurant 2 étoiles du Relais & Châteaux Le Manoir aux Quat'Saisons, sur les conseils appuyés de Loïc Glevarec, le directeur de la restauration de l’hôtel du Palais à Biarritz. Il y passera deux ans avant de rejoindre l’établissement qui bouleversera sa carrière.
Au Gidleigh Park, un Relais & Châteaux aux 2 étoiles Michelin à Chagford dans le Devon, il entre en 2009 comme assistant du directeur de restaurant, pour en sortir six ans plus tard avec la casquette de directeur général. « J’ai eu beaucoup de chance », résume Damien Bastiat avec humilité. Une chance provoquée en réalité par le talent et la passion qui l’animent dans chaque action et chaque nouveau projet.
Une rencontre fut par la suite déterminante : Sue Williams, alors directrice générale du Bath Priory (Bath, Somerset) et de Gidleigh Park, propriétés du groupe Andrew Brownsword Hotels, repère son potentiel. Elle l’entraîne à concourir aux St Julian’s Scholars, un programme de bourse d’études qui ouvre l’accès à une formation de l’École Hôtelière de Lausanne. Bourse qu’il obtient, et qui lui permet de bénéficier du programme « Improving Business Performance, Accounting and Finance » à l’été 2012. À son retour, Sue Williams le nomme Directeur des Opérations puis directeur général de Gidleigh Park. Un poste qui enrichit son expérience et le conduit vers l’Irlande.
« Notre objectif était de faire du mieux possible »
Il passera sept ans à la direction du Ballyfin Demesne. Ici, le propriétaire, Fred Khrehbiel, lui laisse carte blanche, une opportunité exceptionnelle pour le jeune homme. Il devient rapidement un mentor pour le jeune Damien :« Il m’a beaucoup appris sur les plans personnel et professionnel. Il fait partie de ces personnalités frustrantes, car elles ont toujours la réponse appropriée à chaque question, ont une vraie vision » s’émeut-il.
Par ailleurs, « le coût associé à la gestion d’un établissement de luxe est énorme, j’ai eu la chance de pouvoir gérer Ballyfin comme si c’était mon hôtel » se rappelle-t-il.
Une confiance récompensée lorsque l’hôtel de Ballyfin est nommé “Best Hotel In the World” par Condé Nast Traveller en octobre 2016. Lorsqu’on l’interroge sur les clefs d’un tel succès, il indique que ses équipes et lui-même étaient très surpris par la récompense.
Car l’homme n’est pas en quête de titres, mais de service de qualité. « Notre objectif était de faire du mieux possible, de communiquer avec les clients, de comprendre leurs attentes, connaître ce que nous aurions pu améliorer » explique-t-il.
Avant de rejoindre la France métropolitaine, Damien Bastiat quitte l’Irlande pour une année sous le soleil des îles sous le vent. Il pose en effet ses valises au Relais & Châteaux Le Toiny, à Saint-Barthélemy en 2021.
« La collection se lance, nous en sommes au stade de nourrisson. »
Lorsque Vincent Gombault et son épouse ont proposé à Damien Bastiat de prendre les rênes d’Almae, lui et son épouse, issue également de la restauration, n’ont pas hésité. La collection est naissante et prometteuse, l’outil de travail exceptionnel. Damien Bastiat se réjouit de contribuer au développement d’un tel projet, de « mettre sa pierre à l’édifice, de faire partie de l’équipe qui lance la collection ». C’est fort de cette ambition qu’il quitte St Barth pour Saint-Nicolas de Véroce.
« La collection se lance, nous en sommes au stade de nourrisson. Nous devons continuer à l’améliorer et à créer une collection de propriétés dans lesquels les clients peuvent se retrouver en termes d’expérience, quelle que soit la propriété choisie » appuie-t-il.
« Les propriétaires ont un réel amour du produit noble, comme la pierre ou le marbre, et chaque propriété est un clin d’œil aux autres » poursuit-il. Par ailleurs, « le côté très humain, favorisé par des propriétés de petite capacité, offre une identité très intimiste à chaque établissement ».
De son expérience irlandaise et caribéenne, il retient l’importance d’ouvrir son offre à une clientèle internationale « La clientèle est plus internationale à St Barth et en Irlande, j’aimerais y travailler pour la collection Almae » ambitionne-t-il. « Ces clients sont à la recherche d’expériences intimistes et uniques » ajoute-t-il. Une attente à laquelle répondent pleinement les cinq hôtels de la collection Almae.
« Mon premier défi sera ici de m’entourer de personnes de qualité pour chaque maison et dupliquer un service de qualité » précise-t-il.
La gastronomie au cœur du projet
Almae accorde une place importante à l’offre gastronomique dans ses établissements, qui s’installent parfois dans des destinations dans lesquelles il n’existe pas toujours une offre de restauration, à l’instar de Saint-Nicolas de Véroce.
Pour celui qui est issu de la restauration et qui a évolué dans des restaurants deux étoiles durant toute sa carrière outre-manche, la gastronomie est au cœur du projet de développement :« Chacune de nos propriétés offre deux types de restauration, pour aiguiser la curiosité de nos clients et diversifier l’offre pour nos clients longs séjours. Nos restaurants gastronomiques sont complétés par un bistrot qui raisonne également pour une clientèle locale » décrit-il.
« Les clients recherchent plus un côté joueur dans nos restaurants gastronomiques. À La Nauve, notre chef exécutif, Anthony Carballo, désire composer ses menus en collaboration avec le client. Nous recherchons, dans les équipes, des chefs qui ont cette vision d’ensemble pour offrir un repas d’exception, mais qui comprennent que les clients peuvent avoir envie de simplicité avec des produits régionaux » conclut-il.
« On peut former une personne à ce qu’elle doit faire, mais la personnalité, le caractère, l’envie de faire plaisir aux clients, est en soi »
Conscient du défi de fidéliser les collaborateurs, réaliste quant aux changements des métiers depuis le début de sa carrière 25 ans auparavant, il ambitionne de « motiver les jeunes et leur transmettre la passion ». Pour cela, il compte exploiter son expérience irlandaise. Les collaborateurs n’étaient souvent pas issus du sérail, cependant ils étaient des locaux, passionnés de leur territoire. « Je les recrutais, non pas pour leurs compétences professionnelles, mais pour leur personnalité » rappelle-t-il. « On peut former une personne à ce qu’elle doit faire, mais la personnalité, le caractère, l’envie de faire plaisir aux clients, est en soi » affirme-t-il.
Si Vincent Gombault a redonné vie au village de Saint-Nicolas de Véroce en ouvrant l'Armancette, un défi reste à révéler : y faire revenir les jeunes générations, pour créer une alchimie avec les habitants de toujours. « Nous avons aujourd’hui des personnalités formidables du village, comme Nadine, la fille de l’ancien boulanger » se réjouit-il.
Si les équipes de managers sont quasiment au complet, notamment dans le nouvel établissement de la collection, La Nauve Hôtel & Jardin, dont l’ouverture est imminente, les postes de chef de rang, commis ou chefs de partie restent à pourvoir dans les restaurants.
« Lead by example »
L’homme de terrain connaît et accepte les contraintes administratives de sa nouvelle fonction, mais compte préserver le lien fort qu’il a toujours entretenu avec ses collaborateurs et ses clients.
« J’aime être sur le terrain, avec mes collaborateurs, avoir des conversations franches, dans la bonne humeur » décrit-il. Cet homme entier a, cela dit, une légitime exigence : que chacun œuvre dans le respect, « le respect se gagne » précise-t-il.
Un besoin d’être sur le terrain pour le « côté cohésif », mais également pour « échanger avec les clients », prendre le pouls de leur satisfaction, découvrir des parcours de vie, s’enrichir des autres.
« J’affectionne la période de Noël et du Nouvel An, car je reçois peu d’emails, indique-t-il, l’ambiance est différente avec les clients et les équipes ». C’est aussi une période qui rappelle que les collaborateurs travaillent lorsque leurs proches célèbrent en famille. « Le moment nécessite de remotiver tout le monde » ajoute-t-il.
« C’est un métier fascinant »
Aux jeunes qui souhaitent entrer dans l’hôtellerie de luxe, il recommande « d’avoir envie de faire plaisir aux gens, d’avoir le goût du partage ».
Le passage par l’école hôtelière reste « une base » pour Damien Bastiat, qui encourage toutefois les candidats à « ne pas se bloquer » s’ils n’y sont pas allés. Ainsi, il recherche avant tout « des personnalités, du savoir-être, de l’empathie » chez les candidats. « Si vous avez ces qualités, n’hésitez pas à approcher les directeurs » incite-t-il.
Il apprécie, en effet, les candidats qui vont au-delà d’un envoi traditionnel de CV. Se présenter à l’hôtel, être curieux, demander à visiter un établissement, peut-être une voie intéressante pour sortir du lot.
« Il faut s’accrocher. C’est un métier fascinant, qui permet à la fois de voyager, de rencontrer des personnes aux parcours fascinants, de côtoyer des personnes pour qui le luxe est la norme » ajoute-t-il.
Il rappelle également les contraintes du métier, qu’il faut accepter avant de le rejoindre. « Le métier évolue et les mentalités aussi, mais il faudra toujours travailler du lundi au dimanche, pendant que les autres s’amusent ». Des inconvénients aisément surmontables si l’on est passionné par ce métier.
« Le plus grand avantage de ce métier est de ne pas vivre de journée identique, puisque nous travaillons à 100% avec l’humain. Ce matin, j’étais en rendez-vous avec notre architecte, puis j’ai rencontré des clients, avant une réunion avec nos collaborateurs italiens pour travailler à l’amélioration du service, et à cet instant, je suis en interview » illustre-t-il.
Sa vision du luxe : « Le luxe, c’est être capable de servir un cappuccino sans chocolat dessus, car on reconnaît le client »
« L’hôtellerie de luxe se différencie, car c’est souvent un lieu dans lequel les clients viennent célébrer un évènement, dans lequel les attentes sont fortes » précise-t-il.
« Nous voulons dépasser les attentes de nos clients, ce qui est parfois difficile, mais c’est un challenge agréable », affirme-t-il.
Damien Bastiat voit dans le luxe un moteur économique. « Pour certains, le luxe est le quotidien, pour d’autres, c’est un élément spécial dans leur vie, une fois unique » ajoute-t-il.
Finalement, pour ce passionné du service, « le luxe, c'est l’attention que l’on peut porter aux clients qui viennent nous voir. C’est être capable de servir un cappuccino sans chocolat dessus, car on reconnaît le client » conclut-il.
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