PORTRAIT DE MYRIAM KOURNAF-LAMBERT, DIRECTRICE GÉNÉRALE DE L'HÔTEL DU COUVENT À NICE (France)
Depuis ses premiers pas à Marrakech jusqu'à son accomplissement récent au Couvent, la Niçoise mène une carrière faite de rencontres, de coups de cœur et de générosité. |
|
PORTRAIT DE MYRIAM KOURNAF-LAMBERT, DIRECTRICE GÉNÉRALE DE L'HÔTEL DU COUVENT À NICE (France)
Depuis ses premiers pas à Marrakech jusqu'à son accomplissement récent au Couvent, la Niçoise mène une carrière faite de rencontres, de coups de cœur et de générosité. |
Category: Europe - France - Industry economy
- Interviews and portraits
- Hotel opening - Interviews
Interview made by Vanessa Guerrier-Buisine on 2024-11-04
Myriam Kournaf-Lambert, aujourd’hui directrice générale de l’Hôtel du Couvent à Nice Photo credit © David Atlan / David Atlan Myriam Kournaf-Lambert incarne la vision humaine de l’hôtellerie de luxe. Cette dirigeante a su forger son propre chemin tout en restant fidèle à ses valeurs et à sa passion pour les relations humaines. Née à Marrakech, Myriam a grandi dans un environnement imprégné par l’hôtellerie. « Jusqu’à mes 10 ans, j’ai vécu à la Mamounia, à Marrakech, que mes parents dirigeaient », raconte-t-elle. Malgré cette immersion précoce dans l’univers de l’hôtellerie, elle grandit avec la conviction que ce monde « fou » n’est pas pour elle, et choisit un chemin différent.
Elle s’envole pour Nice pour débuter des études en administration des entreprises et civilisation américaine, animée par un rêve d’entrepreneuriat. « J'adore imaginer, dans une perspective business, concevoir un business plan, projeter l’articulation de l’entreprise, penser sa structure et ses équipes… » évoque-t-elle. C’est lors d’un stage d’une année au Four Seasons d’Atlanta que l’hôtellerie s’impose comme une évidence. Une révélation qui marquera le début de son ascension.
De Nice à Los Angeles : une carrière en deux continents
De retour en France en 1994, Myriam fait ses débuts dans la baie des Anges en tant que commerciale, mais son goût pour l’international la pousse rapidement à repartir aux États-Unis. À Los Angeles, elle devient chasseuse de têtes pour Ritz-Carlton. « Cette expérience m’a beaucoup appris sur les ressources humaines, mais les horaires de bureau ne me convenaient pas », explique-t-elle. Après cette parenthèse californienne, Myriam décide de revenir sur la Côte d’Azur.
En 2000, elle rejoint l’équipe du Garden Beach à Juan-les-Pins, où elle participe à la « méridionisation » (passage à la marque Méridien) de l’hôtel. « C’était une expérience fantastique », se remémore-t-elle. Elle croise alors le chemin de son premier mentor, un homme qui bouleversera son avenir professionnel : en 2003, Valéry Grégo, alors co-actionnaire du Beau-Rivage à Nice, la recrute pour conduire la rénovation de cet hôtel. Elle y joue un rôle crucial aux côtés de l’architecte Jean-Michel Wilmotte. « Nous avons été le premier hôtel urbain de Nice sans vue sur la mer, un pari osé », souligne-t-elle avec fierté.
Une créativité exacerbée à l’hôtel Montalembert
Si l’audace est l’un des traits de caractère de la jeune hôtelière, la créativité l’est tout autant. En 2005, elle prend la direction de l’hôtel Montalembert, propriété du groupe Majestic et de la famille Soldevila, à Saint-Germain-des-Prés. La jeune Niçoise, qui n’a aucun réseau à Paris, part de zéro. « Il fallait tout reprendre en main », explique-t-elle. Myriam consacre son énergie à cette mission, et tisse très rapidement un réseau local dense dans un Paris jusqu’alors inconnu de la Niçoise. Elle se nourrit de l’identité de ce quartier fréquenté par la scène littéraire pour créer le premier prix littéraire du Montalembert, avec la maison Gallimard voisine. La férue de culture s’épanouit rapidement. « Les déjeuners littéraires étaient un moment magique », raconte-t-elle.
Son engagement sans relâche et l’affection qu’elle porte à ses clients et à son équipe a rapidement permis au Montalembert de retrouver sa place dans le cercle fermé des hôtels de luxe parisiens. « Nous avions 52 % de clients fidèles en chambre et 90 % au restaurant », se souvient la dirigeante. Pour elle, qui affectionne autant son métier pour le défi des résultats à atteindre que pour les puissants liens humains qu’elle peut tisser, l’expérience est une réussite. « J'avais une équipe et une clientèle fantastiques et une relation exceptionnelle avec les propriétaires. L’affect compte beaucoup pour moi qui suis dans l'émotion et dans l'humain. Lorsqu’ils ont décidé de vendre l’hôtel, je ne voulais pas rester », se souvient-elle.
L’appel de Coppola : une expérience inoubliable
Après neuf années à la tête du Montalembert, Myriam imprime son départ d’un au revoir à ses clients les plus proches. Elle reçoit alors un courriel inattendu de Francis Ford Coppola. « Il m’a écrit “What’s next?” », se souvient-elle. Ce message marquera le début d’une aventure exceptionnelle aux côtés du célèbre réalisateur, qui lui propose alors de devenir présidente de la collection The Family Coppola Resorts. « C’était une opportunité incroyable. J’ai passé trois ans à superviser ses établissements au Belize, au Guatemala et dans la Napa Valley. »
Au-delà de la rencontre avec Francis Ford Coppola et de la gestion hôtelière, cette mission lui a permis d’élargir ses horizons culturels. « J’ai appris énormément, notamment en travaillant avec des équipes locales, en espagnol. C’était un échange culturel et humain très enrichissant », raconte-t-elle.
Retour en France : entre leadership et transmission
En 2018, Myriam relève un nouveau défi lorsqu’elle est sollicitée par Lorène Martel, propriétaire du groupe Caravelle, pour diriger leur pôle hôtelier. « Ce projet me permettait de poser mes valises tout en continuant à structurer et à professionnaliser des hôtels », explique-t-elle. Elle prend alors en charge les établissements du groupe, dont Le Cinq Codet à Paris, le Château de Fonscolombe à Aix-en-Provence et le Château d’Audrieu en Normandie. Elle focalise son attention sur la structuration des équipes, positionne des directeurs pour chaque hôtel et adosse certains établissements à Relais & Châteaux. « L’humain est au cœur de mon travail. Avant d’ouvrir un hôtel, il faut d’abord bâtir une équipe solide », affirme-t-elle avec conviction. Une philosophie qu’elle appliquera rapidement au projet le plus ambitieux de sa carrière.
La renaissance de l’Hôtel du Couvent, son retour aux sources
Tout au long de son parcours, son amour de Nice est resté chevillé au corps et, quand, en 2014, Christian Estrosi, maire de Nice, évoque avec elle son désir de transformer le couvent des sœurs clarisses en hôtel de luxe, Myriam n’hésite pas un instant. Elle pense immédiatement à son mentor, Valéry Grégo, fondateur du groupe Perseus. Ensemble, ils dédieront dix années à la renaissance de ce lieu historique. Une relation d’admiration la lie à Valéry Grégo et nourrit sa détermination au quotidien : « Je l'écoute beaucoup, il est fascinant. J’ai besoin d’être inspirée, mon métier est bien plus qu’un job, c’est un immense pan de ma vie », décrit-elle. En plus de ce besoin d’inspiration, Myriam doit s’imprégner de chaque détail de son établissement, partager ses valeurs avec les membres de son équipe, s’investir, parfois au-delà du raisonnable, pour garantir le succès de son hôtel et la satisfaction de ses clients. Une réussite qu'elle attriibue volontiers à son équipe qu'elle chérit tant.
Au Couvent, ouvert en juin dernier, Myriam transforme son attachement à Nice en force. Comme au Montalembert, elle fédère, rassemble, et cherche à faire de l’Hôtel du Couvent un lieu de vie unique où se rencontrent voyageurs et locaux. En créant des synergies entre ses deux mondes, elle et son équipe transforment l’établissement en une communauté soudée et en une référence incontournable de l’hôtellerie niçoise. « Ce que j’aime le plus dans ce métier, c’est de faire plaisir. Que ce soit à mes équipes, à mes clients ou à mes proches, voir les autres heureux grâce à mes attentions est ma plus grande satisfaction », confie-t-elle.
Une vision du service et de l’excellence qui continue de guider son action au quotidien, mais qu’elle conjugue avec un sens accru de l’anticipation, notamment quant au choix de ses collaborateurs : « J'aime les choses bien ficelées. Je réfléchis toujours au coup d'après. Avant l’ouverture, j’ai mené de nombreux entretiens pour composer une équipe telle que je l’imaginais, avec des valeurs, un enthousiasme et une détermination communs » décrit-elle. Pari réussi, puisque trois mois après son ouverture, ce joyau de l’hôtellerie de luxe symbolise déjà à la fois l’histoire, l’innovation et la convivialité.
Jeune maman d'un petit Louis, Myriam Kournaf-Lambert incarne un modèle de leadership au féminin dans le secteur de l’hôtellerie de luxe. Si elle est aujourd’hui une mère et une dirigeante accomplie, elle n’oublie pas de transmettre son savoir aux jeunes professionnels. « Je conseille souvent aux jeunes de ne pas se spécialiser trop tôt, de garder une certaine ouverture. L’hôtellerie peut être un choix, mais il faut s’assurer que c’est vraiment ce que l’on souhaite », conseille-t-elle.
Avec une telle personnalité, Myriam Kournaf-Lambert continue d’inspirer ceux qui ont la chance de travailler avec elle. L'attention qu'elle porte à la bienveillance, à la qualité et à la personnalisation du service se ressent non seulement dans son approche managériale, mais aussi dans sa vision de l’hôtellerie de luxe.
|
|